HOME > Feature Articles > 【L’esprit des Ryukyu】Édition spéciale (HIDEN Juillet 2025)「HOMMAGE À CHINEN SENSEI」

Interview/Textes: Daniel Mardon
Photographe/traductrice: Yuko Takahashi

Daniel Mardon, « Le Karatéka-Thérapeute »
Physiothérapeute et pratiquant d’arts martiaux de longue date, Daniel Sensei vit à Okinawa. L’une de ses passions est de trouver des Dojo uniques ayant une forte personnalité qui laissera une empreinte à jamais.
Avec son épouse Yuko Takahashi, qui est une grande historienne du Karaté, ils nous permettent de découvrir de nombreux aspects cachés du Karaté d’Okinawa…
Cette série d’articles propose d’explorer l’esprit originel du Karaté.

Aujourd’hui, le sujet est :
Hommage à Chinen Sensei; le plus Français des Maîtres du Karaté d’Okinawa.

Chinen Kenyu Sensei.

Introduction

Maître Chinen Kenyu (1944-2024), 10 ème dan de Karaté Shorin-Ryu et de Kobudo, nous a quittés récemment à l’âge de 80 ans.  Il laisse derrière lui, un enseignement riche en techniques et en philosophie avec l’école Oshukai…

Né sur la petite île de Iejima, au Nord-Ouest d’Okinawa (5 km du port de Motobu), il fut élève de Maître Nakazato Shugoro pour le Karaté et de Matayoshi Shimpo pour le Kobudo.  A l’âge de 31 ans, il réalise son souhait de diffuser la culture d’Okinawa à l’étranger et surtout d’y enseigner son Karaté.

Il sait qu’avec l’importante diaspora okinawaïenne (Brésil, Pérou, Hawaï), ainsi que grâce aux GI passés par Okinawa, son Karaté est déjà très présent à l’Ouest et aux Amériques en particulier… Le jeune Maître se décide alors pour l’Europe qui se situe entre l’Ouest et l’Extrême-Orient.  Il choisit Paris qui est le point central entre ces 2 pôles extrêmes du Karaté.  C’est donc en 1976 qu’il s’y rend avec une valise, sans contact et sans aucune connaissance de la langue.

Après des débuts difficiles où il est surtout perçu comme enseignant de Kobudo dans cette France qui ne fonctionne qu’au Karaté japonais, il réussit tout de même à y imposer peu à peu son Karaté traditionnel…

En 1985, il crée l’association Oshukai dont il est le directeur technique.  Vu ses qualités humaines ainsi que celles de son enseignement, beaucoup de Karatékas venant d’Europe, du Canada, d’Argentine, du Chili et de l’Inde rejoignent son école qui devient donc vite internationale.  C’est ainsi que se crée la “World Oshukai Federation” en 1993, dont il fut le Président jusqu’à sa mort et qui représente aujourd’hui 15 pays avec 3400 pratiquants.  Depuis ces derniers mois, son nouveau Président est Sueyoshi Mikio Sensei.   Maître Chinen a donc qualité de fondateur de la W.O.F.

Il est important de dire que parmi les Français pratiquants le Shotokan de l’époque, certains qui, contrairement à moi, ont eu la chance de le rencontrer, se sont ralliés à lui.  Ainsi, un de ses plus fidèles disciples de la première heure est devenu le Président de Oshukai France et siège également aujourd’hui comme Vice-Président de la W.O.F.  Il s’appelle Maurice Roggero et est 9e Dan W.O.F.

La Oshukai France se porte bien avec à elle seule, un tiers des membres du monde et 39 Dojos sur son territoire…

Parmi les nombreux souvenirs et anecdotes que garde Maurice Roggero Sensei de son Shisho, il nous explique aussi que celui-ci était très positif et allait toujours de l’avant, recherchant constamment l’efficacité des techniques. Homme simple toujours bienveillant envers ses élèves, qu’il connaissait bien car  toujours à leur écoute, ceci ne l’empêchait pas de se séparer de ceux dont l’égo avait trop pris le dessus.

Son objectif était de faire évoluer ses élèves grâce au Karaté tant techniquement que sur le plan personnel.  Pratiquer le Karaté n’a pas de sens selon Maître Chinen si cela n’a pas de répercussions positives dans notre vie, à la maison, à l’école ou au travail.

Afin de renforcer nos capacités physiques et mentales, il nous a transmis les principes de base du Karaté d’Okinawa que sont “Kyu-Do” (Recherche de la voie), “Tan-Ren” (Travailler dur) et Cho-Wa (Harmonie).  Il a su nous faire comprendre que pour être un bon combattant efficace, il ne fallait pas brûler les étapes.  Qu’il fallait  d’abord travailler les Ki-hon (bases), puis les Kata, puis les bunkai, ensuite les 応用 Oyo (applications), les 約束組手 “Yakusoku Kumite” (attaques/défenses codifiées), pour enfin venir au Kumite…

Ceci est toute la différence avec le Karaté sportif qui ne travaille généralement que le Kumite en privilégiant le physique et les « spéciaux ».

Comme beaucoup de grands Karatékas, il est à noter également que Maître Chinen avait aussi un autre talent, celui de Peintre.  Une exposition lui avait été consacrée à Naha il y a encore quelques mois.

Petit speech d’accueil.

Le Dojo du “Karate-Kaikan” aux couleurs de la W.O.F.

Avec les 4 principaux Maîtres. De gauche à droite : Oshiro Kohei (secrétaire général), Maurice Roggero (Vice-Président), Sueyoshi Mikio (Président) et Aleksander Staniszew (Vice-Président).

Salut formel en Seiza.

Oshukai débarque pour un séminaire aux sources

A peine mon Do-Gi sort du lavage suite aux stages avec la “Mission De Défense Française” dirigés par Uema Takeshi Sensei et Major Gérald, voici que mon éditeur de Tokyo me demande de couvrir un autre événement…
Il s’agit d’un stage de plusieurs jours impliquant la W.O.F. (World Oshukai Federation) dont le siège est à Okinawa, mais qui est très représentée en Europe et notamment en France, puisque son fondateur Chinen Kenyu Sensei y vécut près de 50 ans.  Ayant quitté la France il y a plus de 30 ans, je n’ai aucune idée de ce que peut représenter le Karaté d’Okinawa Français, vu que celui-ci vivait caché et en marge de la toute puissante et unique Fédération Française de Karaté….

J’ai comme information que la délégation, principalement française, est conduite par deux grandes figures du Shorin-Ryu et du Kobudo européens, tous deux étant disciples de même niveau de Chinen Sensei .  Il s’agit de Maitre Maurice Roggero et de son homologue Polonais Aleksander Staniszew.

Jour “J”

Ayant dû subir quelques heures auparavant une petite intervention sur mon os maxillaire, c’est bourré d’antibiotiques et de pain killers que je me pointe au petit matin au Karaté Kaikan.  Nous croisons les sourires et les bonjours de personnes munies de sacs de sport, qui semblent reconnaître le couple de pigistes que Yuko et moi formons depuis plusieurs années.  Il va falloir encore essayer d’être à la hauteur pour cette tâche!

Un des Dojo du Karaté Kaikan a été spécialement préparé aux couleurs de la Fédération Mondiale Oshukai et on me présente à son nouveau Président, Sueyoshi Mikio Sensei ainsi qu’aux Vice-Présidents Maurice Roggero et  Aleksander Staniszew, qui sont aussi les Présidents de, respectivement, Oshukai France et Oshukai Pologne.  Je lis immédiatement beaucoup de gentillesse et d’humilité dans les yeux de ces 3 hommes qui m’invitent à prendre place au cours.  La première partie est conduite par Maître Staniszew et débute par un long salut en seiza avec Moku-So, Shomen-Ni-Rei, Otagaï-Ni-Rei.

[A NOTER:    Bien que certains Dojos très internationaux d’Okinawa pratiquent des saluts formels, ceci n’est pas standard à Okinawa, surtout dans les petits Dojos et cela surprend souvent certains Karatékas occidentaux ou Japonais.  Si le respect et saluer sont bien sûr de mise, les saluts au sol se font en priorité en entrant et en sortant de l’ère d’entraînement.  Ceci est particulièrement vrai pour les cours enfants.  En fait, chaque Sensei décide des règles propres à son Dojo et il n’existe pas de standard.  Parmi les formes de saluts uniques à certains Dojos, veuillez-vous référer à nos précédents articles comme ceux sur le Kyudokan de Higa Minoru Sensei (https://budojapan.com/karate/dm11f/) ou le Yūsenkan Moidi Motobu-Ryu de mon regretté ami Yagi Isao Sensei (https://budojapan.com/karate/dm06f/)].

Après un bon échauffement, les Kihon et les enchaînements se succèdent très vite et tout le monde semble bien rodé sauf moi, qui encore patauge, comme c’est toujours le cas lorsque l’on sort des sentiers battus de son style et de son Dojo-chéri.  Je dois dire que c’est toujours frustrant et bien qu’ayant pratiqué le Karaté sur les 5 continents, je n’ai jamais eu autant de mal qu’à Okinawa!   Pourtant j’avais l’espoir de bien m’éclater en apprenant que Maurice Roggero Sensei ainsi que les autres anciens de ma génération, Gilles Mehard et Lucien Santos, sont tous issus du même Shotokan que le mien…. Et bien, je m’aperçois que comme prévu, non seulement le Shorin-Kobayashi de Chinen Sensei est différent du Shorin-Sukunai de Shimabukuro Zenpo Sensei (auquel j’ai commencé à m’habituer), mais qu’il est aussi différent du Kobayashi de Higa Minoru’s Sensei (qui est le plus proche de mon Shotokan)…
Donc parmi les 3 variétés de Shorin-Ryu que sont le “Sukunai” de Kyan Chotoku, le “Kobayashi” de Chibana Chōshin et le “Matsubayashi” de Nagamine Shoshin, il existe donc aussi des variations au sein même de chaque variété!

Le Tsuki pratiqué ici est déroutant pour moi, car il s’agit d’un 斜拳 “Shaken”; ce fameux poing-diagonal hérité de Kyan Chotoku et qui est la spécialité du “Seibukan” (le Dojo Sukunai de Shimabukuro Zenpo).  Toutefois, il ne se déploie pas ici en visant la ligne médiane (comme en Sukunai et Shotokan), mais parallèlement, dans l’alignement de l’épaule!  Cet alignement est bien la caractéristique du Kobayashi de Chibana Chōshin, mais dans lequel le poing est déployé en pronation, comme en Shotokan!

Pas facile de m’y retrouver avec toutes ces nuances qui font la fierté et la particularité de chaque Dojo.

Pour mieux comprendre, parlons du travail au makiwara, qui nécessite, dans le “Shorin-Kobayashi”, de se décaler légèrement de la cible afin que le bras puisse se déplier en ligne droite de l’épaule.   Par contre, la différence dans ce “Kobayashi Oshukai” est que le poing arrive en “Shaken”…  Donc on peut conclure que le Tsuki de Chinen Sensei est l’héritage des enseignements de deux grands Maîtres; ceux de Kyan Chotoku ainsi que ceux de Chibana Chōshin.

Les blocages ressemblent parfois à ceux du Shotokan, mais beaucoup aussi à ceux du Naha-Té avec mains ouvertes et saisies.   Les Kote Kitae et séances d’endurcissement sont semblables à ce que je rencontre en Goju-Ryu.  En fait, tous les Ryu d’Okinawa partagent des façons de faire similaires, même si les techniques diffèrent plus ou moins.  Voici pourquoi le Shorin-ryu, dont est issu le Shotokan, peut en paraître si éloigné dans son essence…

Je confie ceci à  Maurice Roggero Sensei qui s’apprête à assurer la 2e partie.  Il vient un peu à mon secours en ralentissant le rythme et en m’expliquant que mon problème principal est que j’utilise encore les positions trop basses du Shotokan qui me ralentissent considérablement.
Je dois donc oublier les 後屈 Kōkutsu qui n’existent pas ici ainsi que les 前屈 Zenkutsu en fente longue…. 

Par contre, je redécouvre pour la première fois en 13 ans de pratique à Okinawa, les Yoko-geri ainsi que les Ushiro-geri!   Séquence tristesse, car ils me sont difficiles à exécuter aujourd’hui, alors qu’ils furent mes “spéciaux” qui m’auront fait marquer des points en compétition jadis…  Roggero Sensei me corrige aussi mon Mawashi-geri qui, dans le style Oshukai, se présente comme un Mae-geri qui se déroule ensuite avec un déhanchement circulaire.

Je remercie vivement les Sensei Roggero et Staniszew pour avoir été si patients avec moi et avoir supporté ma frustration accompagnée parfois de quelques jurons qui ont pu passer pour des Kiaï…

Succession de Kihon avec longues répétitions.

Kihon Keri par Staniszew Sensei.

Staniszew Sensei démontre la subtilité des blocages sans force.



Roggero Sensei expliquant les différentes approches pour bloquer ou dévier un tsuki.

Parole aux disciples de Chinen Sensei

Président Sueyoshi ainsi que les 2 Vice-Présidents Roggero et Staniszew s’accordent à dire que leur mission est de préserver fidèlement les enseignements de Maître Chinen qui représentent bien la philosophie du Karaté d’Okinawa.

Le travail pratiqué dans les Dojos doit rester fondé sur l’application des techniques de combat.   50% représente la répétition dans le vide des techniques:  Kihon, Waza, Kata et 50%, le travail du combat par la mise en pratique des techniques au contact: Kata-Bunkai (désassemblage), Yakusoku (Kumite codifiés), Kote-Kitae (endurcissement) et Jiyu-Kumite (combat-libre)

Il faut conserver par des échanges permanents au sein de la Fédération (stages, réunions, fêtes) un esprit de famille et de cohésion.  Chinen Sensei se déplaçait régulièrement dans de nombreux pays pour y diriger régulièrement des stages et nous devons continuer de le faire.   C’est ainsi qu’une relation de confiance et de reconnaissance s’était établie depuis le début.  Avec ces concepts liés à la recherche permanente d’efficacité, Maître Chinen a transmis beaucoup de techniques qui peuvent être adaptées selon la morphologie du pratiquant.  Ceci explique les raisons de son grand succès à l’étranger.

Roggero Sensei nous explique sa rencontre avec Maître Chinen:
-“C’était en 1976, lors d’un stage de Kobudo; discipline quasiment inconnue et très difficile d’accès à l’époque.
Sachant que j’étais Karatéka, il me montrait le soir après le stage des techniques de Shorin-Ryu.  Celles-ci n’avaient rien à voir avec ma pratique Shotokan basée plus sur la force et des blocages en reculant, certes efficaces, mais qui retardaient les contre attaques à cause des distances. Là, Chinen Sensei me demandait même de bloquer en avançant!  Étant de gabarit moyen, je m’étais aussi rendu compte que contre des combattants plus grands et plus puissants, j’avais des difficultés à encaisser avec les blocages de face en Zenkutsu.

Malgré les problèmes de communication, il mettait, grâce à une gestuelle précise, tous ses efforts pour me faire comprendre ce qu’était ce nouveau style pour moi et ce fut une révélation.  En 1980 j’ai décidé alors de changer de style, après en avoir parlé à mon ancien professeur pour qui j’avais aussi un grand respect.   Le Karaté Shotokan était devenu pour moi moins riche, basé principalement sur la force physique avec tous les problèmes physiologiques qu’il pouvait entraîner à terme. De plus il devenait un sport qui courait derrière la compétition, et qui n’avait plus rien à voir avec un Karaté traditionnel.”

Je reconnais l’enseignement de Kase Sensei quand il nous disait d’imaginer avancer sous un plafond-bas.

Les low-kicks en corps à corps sont autorisés.

Allers et retours de salle avec variation de Keri.

Conclusion avec considérations métaphysiques et mon analyse personnelle biomécanique.

Yuko Takahashi Sensei et moi sommes d’accord sur le fait que ce séminaire fut fort intéressant, car 100% dirigé par des professeurs occidentaux, ce qui constitue une première pour nous.  Le fait que la technique soit Okinawaïenne avec un enseignement à l’européenne m’a encore plus déboussolé, car j’ai eu l’impression de retrouver de vieux amis qui auraient évolué dans un univers japonais parallèle.

En fait c’est exactement ce qui s’est passé!  Chinen Sensei aura permis qu’une oasis okinawaïenne existe en France, puis ailleurs et que des milliers de personnes puissent s’adonner au Karaté sans vivre à sa source.

Bien que le Shorin-Ryu reste assez rigide, comme l’est le Karaté en général par rapport aux boxes pieds-poings, il est tout de même plus fluide que le Karaté japonais, grâce à des positions hautes et courtes.  La vitesse, le timing et l’agilité tranchent avec les explosions lourdes et violentes du Shotokan.  On sent que ce style peut être pratiqué par beaucoup, car moins demandant sur la force.

Pour moi qui ai toujours pratiqué le Karaté et le kick-boxing en parallèle et en les dissociant bien, je pense que le Shorin-Ryu peut les rapprocher un peu et offrir le meilleur des deux.  Toutefois, si je n’ai jamais pu abandonner le Shotokan, c’est dû aux “qualités de ses défauts”, qui font de lui un Karaté extrêmement guerrier avec les Katas les plus impressionnants et les plus durs qui soient…. Son problème principal est sa biomécanique très discutable qui abîme les articulations; des hanches notamment…

Dans les styles d’Okinawa, les blocages défensifs se font plutôt en pivotant de profil vers l’arrière (sur le pied avant) ou en “rentrant” en offensif, pivotant sur le pied arrière….  Il se font en Shiko-dachi, Fudo-Dachi ou autres, souplement, moins ancrés et avec les hanches “ouvertes” (en rotations externes).   La contre-attaque se fait en plongeant puissamment, hanches “fermées” (en rotations internes) exactement comme en boxe et avec de ce fait, plus d’allonge

Ceci est réalisé avec une grande maîtrise du “Gamaku” dont je parle très souvent et qui constitue les muscles de la ceinture abdominale (abdos, obliques, iliopsoas, lombaires) qui est la partie maîtresse pour l’orientation du torse et qui provoque un déplacement du centre de gravité.  S’ensuit les rotations des hanches ainsi que la bascule du bassin qui permettent d’exécuter correctement le mouvement ou la technique.  Le tout se faisant en synergie permet une bonne efficacité.  Ceci est “l’oeuf de Christophe Colomb” de la bonne biomécanique. 

Le Shotokan que l’on m’a appris était l’opposé!  En effet, nos blocages se font généralement sans réel pivot, pieds solidement ancrés et orientés face à l’adversaire (Zenkutsu).   Ceci peut se vérifier dans les Katas ainsi que dans le témoignage de Roggero Sensei décrit plus haut, avec son expression “blocages de face en Zenkutsu”!   

La rotation du torse à 45 degrés servant d’esquive est souvent réalisée avec une mauvaise compréhension ainsi qu’une mauvaise maîtrise du “Gamaku”.   Ceci accentue une rotation interne des hanches en compression, exposant particulièrement les cartilages coxo-fémoraux de la jambe arrière.  De cette même position en fermeture, la contre-attaque ne peut que se réaliser avec une “ouverture” puissante des hanches (rotation externe)…!  Ceci a pour conséquence de surcharger le travail des hanches avec de violentes compressions des cartilages coxo-fémoraux.   

Les positions très basses avec pieds ancrés ne font donc pas bon-ménage avec les mouvements de hanches et constituent une situation aggravante.   De même que les rotations sont de ce fait rendues agressive, l’extension de la jambe arrière (qu’occasionnent notamment les Zenkutsu), crée également un phénomène de vrille des ligaments de la tête du fémur, ce qui est générateur d’inflammation de tous les tissus mous !  Tout ceci a été étudié pour les problèmes rencontrés par les pratiquants d’escrime qui utilisent aussi ces fentes.   Malgré cela, beaucoup de professeurs de Karaté enseignent encore aujourd’hui, qu’il faut tout miser sur les hanches…!

La notion de dur et de souple n’existe pas dans le Shotokan (que j’ai appris) et c’est probablement pourquoi notre immense Maître, Kanazawa Hirokazu, appréciait le Tai Chi sur ses vieux jours…. Le Shorin-Ryu excelle dans des blocages souples et absorbants, ce qui réduit les rapports de force entre individus.  La technique peut donc compenser un manque de force physique.

On me demande parfois pourquoi je continue à pratiquer le Shotokan alors que je le critique souvent…. Cette “love-hate relation” semble toucher beaucoup d’anciens de ma génération qui ne peuvent nier que, à part quelques invraisemblances mécaniques condamnables, ce Ryu possède des valeurs d’équilibre, de stabilité et de puissance que d’autres n’ont pas.

En se plongeant dans l’histoire du Karaté, on comprend mieux que, bien que Funakoshi Sensei n’aie jamais eu les profondes connaissances médicales de Miyagi Chōjun Sensei, il était toutefois un homme brillant et n’est en rien responsable de l’adaptation japonaise qui fut faite de son Shoto Ryu.  Il est certain qu’afin d’enseigner un Karaté de base à des troupes plus qu’à des élèves, il aura fallu mécaniser la méthode d’entraînement dans le style des exercices militaires et du maniement d’armes.  Ceci s’est fait au détriment de la fluidité qui pourtant caractérisait le Karaté de ce grand Maître.  Le Shotokan qui fut créé était plutôt un entraînement de choc pour initier de jeunes hommes, mais n’était pas fait pour être pratiqué sur de longues périodes!

Il est temps d’accepter ces faits et de reconnaître ce qu’il y a à reconnaître.  Ceci peut se faire en célébrant les éléments positifs de l’héritage des grands Maîtres, tout en ajustant le Karaté aux réalités anatomiques et physiologiques.

Étant moi-même un expatrié de très longue date, j’ai beaucoup de respect pour le parcours de Chinen Kenyu en tant qu’homme.  Passer la majeure partie de sa vie dans un pays si différent en tous points est un travail quotidien à faire sur soi-même.  Porter la panoplie de missionnaire pendant toute une vie est un sacerdoce que peu de gens dans leur confort social à la maison ne peuvent imaginer.

Évidemment qu’après avoir quitté ses mentors à 31 ans, on se doute bien que c’est plutôt lui qu’il faut regarder, même si ses Maîtres furent de grandes célébrités.  Son œuvre est donc double!  Il aura gagné le cœur du monde en s’expatriant tout en créant son propre style…

En plus d’être un grand Sensei, Maurice Roggero est très humble et sympathique.

De vieux amis qui débutèrent avant que la Fédération Française de Karaté n’existe et alors qu’il s’agissait encore de la FFJDA! De gauche à droite : Gilles Mehard (Committee Member W.O.F.), Daniel Mardon et Lucien Santos.

Avec quelques membres de plusieurs délégations dont la Pologne, la France, le Canada et Okinawa.

Toujours un immense “Domo Arigato” à Yuko Takahashi Sensei sans laquelle nous ne pourrions avoir développé ce pont régulier d’articles vers le monde entier. (Takahashi veut dire “Haut-pont” en Japonais….)


Daniel Mardon; le Karateka-Thérapeute

Créateur de la méthode Aromapressure® et physiothérapeute également licencié aux U.S.A.; Daniel Mardon est né à Paris.   Une de ses spécialités est l’enseignement et le traitement des lymphoedèmes ainsi que des dommages tissulaires et circulatoires consécutifs aux chirurgies et traitements par radiothérapie.  Sa méthode est utilisée en collaboration avec des Instituts médicaux ainsi que des associations, pour des traitements pré et post-chirurgicaux.     Il fut également physiothérapeute pour deux équipes de football à Paris.    Dès 2005, il fut le producteur de Spas pour de grands hôtels Japonais, tout en œuvrant pour l’enseignement et l’éveil à un plus haut niveau sur les professions de santé.   Auteur de plusieurs livres, une de ses publications majeures est “Physiothérapie et physiologie du travail du corps” (Editions BAB Japan), ainsi que des DVD comme “Daniel Mardon Aromapressure® Method ” (Pony Canyon).   Daniel Mardon apparaît régulièrement dans des émissions de TV, radio ainsi que de nombreuses publications dans les médias.

『身体療法の生理学とボディワーク』(The Physiology of Somatic Therapy and Bodywork)
Co-écrit par Daniel Mardon et Yuko Takahashi En vente à présent sur le site BAB Japan!

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