SUR LES TRACES DE FUNAKOSHI GICHIN
Maître Funakoshi Gichin (1868-1957) est reconnu universellement comme étant “Le père du Karaté moderne”.
Certains contestent toutefois ce titre qu’ils attribuent plutôt à Itosu Anko (1831-1915). Celui-ci fut un grand modèle d’inspiration pour lui. Itosu Sensei avait modifié les Katas et avait créé les 5 Pinan pour faciliter l’accès du Shorin-Ryu aux débutants. Il avait aussi écrit en 1908 les 10 préceptes du Karaté (Tode Jikkun) qu’il avait envoyés aux Ministères de la guerre et de l’éducation du Japon.
Issu du Tomari-Té, le Shorin-Ryu d’Itosu Sensei était devenu l’emblème du Shuri-Té, avec un Karaté plus rectiligne et couvrant de longues distances par rapport au Naha-Té.
Funakoshi Gichin poursuit le travail de son Maître avec de nouvelles modifications ainsi que plus d’expositions publiques. Il diffuse son Karaté à plus grande échelle par le biais de ses livres et publications.
Venant d’un poète-professeur de philosophie, le Karaté de Funakoshi-Shoto constitue un art doté d’une forte discipline physique et mentale. Il y ajoute aussi ses principes philosophiques dont le plus populaire est: “Il n’y a pas de première attaque en Karaté” (空手に先手なし)
Cette maxime “Karaté ni senté nashi”, qui n’est pas très claire pour tous, est souvent démontrée par les Kata, qui commencent toujours par un blocage… Toutefois, certains y voient qu’il y est sous-entendu qu’une éventuelle intention d’attaque constitue déjà une raison d’utiliser son Karaté. Il est alors possible d’utiliser une technique d’attaque afin de se défendre.
SHURI, KARATÉ ET ROIS…
Tout comme Monte-Carlo, le village de Shuri est construit autour du château et fut la capitale du royaume des Ryukyu.
4,5 km à vol d’oiseau séparent la maison familiale des Funakoshi, depuis les hauteurs de Shuri jusqu’au port de Tomari.
Il est dit que le jeune Gichin, bien que de constitution fragile, aimait à faire de longues marches et à s’imaginer partir pour des destinations lointaines depuis ce port très actif. Comme il est dit par ici ; “on peut aller du port de Tomari à Shuri sans passer par Naha…” Si cette pensée avait une signification politique du temps de la royauté et de l’histoire de ce royaume des Ryukyu, elle persiste encore en 2023.
La légende veut aussi que le village de Shuri soit impénétrable, tant dans ses secrets, que dans son immense dédale de ruelles vallonnées et de sentiers de chèvre épuisants. Chaque quartier est unique et raconte sa propre histoire.
Venant de Tomari, on passe par Makabi, qui est aujourd’hui le lieu de sépulture de 3 générations de Maitres légendaires ; Matsumura Sokon, Itosu Anko et Hanashiro Chomo Sensei. De l’autre côté de la petite rivière, on accède aux collines de Shuri et au très élégant Yamakawa Cho (Montagne-rivière-quartier) où sont nés les membres de la tribu Funakoshi, ainsi que la plupart des grands Maîtres précédemment nommés.
Il y a ensuite, sur un autre versant, le quartier le plus noble de tous et qui se nomme Kinjo-Cho.
Si Yamakawa donne sur l’Ouest, avec vue sur Tomari et la mer de Chine, Kinjo Cho est plein Sud et touche au château, avec vue sur les collines et Naha en fond. C’est ici que se trouve cette sublime ruelle pavée médiévale de 300 mètres ainsi que cette oasis tropicale aux arbres multi-centenaires et dont l’un d’eux aurait 1000 ans !
Le Graal, pour nous Karatéka, se situe juste après, au Sud-Est du château et se nomme Sakiyama Cho. Il est le lieu mythique de ce Dojo en plein air, où les arts du Shuri-Té ainsi que du Kobudo se sont développés, entre forteresse et distilleries d’Awamori.
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Ensuite, le quartier qui nous intéresse, est de l’autre côté du château, au Nord et se nomme Sueyoshi Cho. Il abrite cet immense parc-jungle dans lequel Funakoshi Gichin venait s’inspirer pour sa poésie, près des pins qui ondulaient sous la brise marine et qui donne la signification de son surnom poétique de “Shoto”.
Je parcours chemins, sentiers et vallées dans ses traces depuis bientôt 12 années et mes amis Français m’appellent parfois le “Marcel Pagnol d’Okinawa”. Heureusement que les collines de Shuri sont moins hautes que le “Garlaban” au-dessus d’Aubagne !
C’est dans ce parc de Sueyoshi que les âmes de Funakoshi Gichin et de son fils Gigo (Yoshitaka), planent très fortement aux abords d’une clairière entourée de pins ancestraux. 2 pins furent plantés en leur mémoire ainsi que 2 colonnes-stèles séparées de quelques mètres. Le pin symbolisant Gigo/Yoshitaka est mort récemment des suites d’une infection fongique, qui a tué beaucoup d’autres pins sur l’île il y a 2-3 ans.
Un petit grillage rouge entoure un carré de terre sur l’emplacement.
Malgré que l’adage “Nul n’est Prophète en son pays” ait frappé les Funakoshi, leur empreinte est enfin admise et reconnue à Okinawa.
Il faut dire qu’il leur était reproché d’avoir offert le Karaté au Japon ; ce Japon qui avait annexé les Ryukyu en 1879.
Pour récapituler, il existe donc à présent 4 sites principaux sur Okinawa qui honorent officiellement la mémoire du créateur du Karaté Japonais.
1)-Sueyoshi park, avec ces arbres et piquets (plantés en 1998 puis 2004) qui n’oublient pas son 3e fils (Gigo/Yoshitaka), crédité d’avoir “japonisé” le style en y incluant des préceptes du Kendo (Esprit Bushido, fentes très basses et solides), ainsi que du Judo (balayages).
2)-Sakiyama park, avec cette belle stèle de 2018 sur ce plateau verdoyant qui représente le Dojo le plus mythique au monde au sommet de Shuri et aux côtés du Château. Le Karaté Shuri-Té ainsi que le Kobudo y furent largement développés.
3)-Ōnoyama park/Budokan de Naha, qui a depuis 2007, un très beau monument consacré à Funakoshi Gichin.
4)-Le très récent “Karaté Kaikan” (2017) sur une autre colline de Naha fait aussi honneur avec des photos et surtout les originaux des livres écrits par le Maître.
Daniel Mardon; le Karateka-Thérapeute
Créateur de la méthode Aromapressure® et physiothérapeute également licencié aux U.S.A.; Daniel Mardon est né à Paris. Une de ses spécialités est l’enseignement et le traitement des lymphoedèmes ainsi que des dommages tissulaires et circulatoires consécutifs aux chirurgies et traitements par radiothérapie. Sa méthode est utilisée en collaboration avec des Instituts médicaux ainsi que des associations, pour des traitements pré et post-chirurgicaux. Il fut également physiothérapeute pour deux équipes de football à Paris. Dès 2005, il fut le producteur de Spas pour de grands hôtels Japonais, tout en œuvrant pour l’enseignement et l’éveil à un plus haut niveau sur les professions de santé. Auteur de plusieurs livres, une de ses publications majeures est “Physiothérapie et physiologie du travail du corps” (Editions BAB Japan), ainsi que des DVD comme “Daniel Mardon Aromapressure® Method ” (Pony Canyon). Daniel Mardon apparaît régulièrement dans des émissions de TV, radio ainsi que de nombreuses publications dans les médias.